Entrevue avec Paul St-Pierre Plamondon, Chef du Parti Québécois, réalisée par Juliette Léveillée, Éléonore Guévin-Roy, Noémie Boutin, Ève Rioux et Marie-Pierre Beaudet des Comités 12-18 de L’Avenir, de Tingwick et de Ste-Sophie d’Halifax
Comment étiez-vous à l’adolescence ?
J’étais un ado sportif et à mon affaire. Je pense que j’étais plus rebelle enfant qu’ado. Je mettais beaucoup de temps à jouer au football, au tennis et au ballon sur glace (qui est moins populaire aujourd’hui). Autrement dit, j’étais assez tranquille.
Dans quel milieu familial avez-vous grandi ?
Mes parents étaient divorcés. J’avais des « quarts » de frères et des « quarts » de sœurs. On appelait ça comme ça parce qu’on était une famille reconstituée et qu’on n’avait pas de parents communs. On se considérait comme des frères et des sœurs, donc on a inventé le concept de « quart de ».
Quel est votre parcours scolaire ?
J’ai étudié un an au Danemark dans l’équivalent d’un cégep où j’ai appris le danois. J’ai fait mon droit à l’Université McGill, puis j’ai fait une maîtrise à l’Université d’Oxford en gestion.
Quel a été votre premier emploi payant ?
J’étais pelleteur de sauce barbecue chez les usines Berthelet de sauces St-Hubert Barbecue.
Qu’est-ce qui vous a inspiré à faire de la politique ?
J’ai commencé par la commenter et par m’intéresser à certains enjeux. Quand j’étais avocat, j’ai lutté contre la corruption tant ici qu’en Bolivie notamment. Plus on s’implique, plus on a envie d’aller à la source des enjeux, là où les décisions se prennent. On a l’espoir de corriger certaines choses et d’améliorer un peu la société. C’est donc en s’impliquant que la politique apparaît comme un choix logique, du moins dans mon cas. Je n’avais pas d’envie pressante d’aller en politique par contre.
Qu’est-ce qui vous a amené à choisir ce parti ?
C’est un parti démocratique qui défend les Québécois en leur laissant la parole sur ce qu’on devrait faire. C’est voté en bonne et due forme, contrairement à d’autres partis qui sont l’œuvre d’une personne ou de quelques personnes qui décident de tout et disent aux autres quoi faire. Cette démocratie amène le Parti Québécois à penser qu’on doit vivre dans une société juste où il y a le moins d’inégalités possibles. On doit vivre dans une société libre où on a notre propre pays et où on peut influencer le reste de la planète positivement.
Y a-t-il des projets ou des réalisations de votre parti dont vous êtes particulièrement fier ?
Il y en a plein. Le Parti Québécois est le parti de plein de réformes. La protection des terres agricoles, la protection de la jeunesse, la protection du consommateur, la protection du français évidemment avec la Loi 101 et bien d’autres. C’est un parti qui a à cœur de rendre la société québécoise plus juste et très différente du reste de l’Amérique du Nord. On s’inscrit dans cette tradition. Par exemple, on a beaucoup contribué plus récemment aux CPE, une invention de notre cru.
Quel est le plus gros risque que vous avez pris dans votre carrière ?
J’en ai tellement pris. (rires) En 2016, j’ai fait une première course à la chefferie du Parti Québécois alors que les intentions de vote n’étaient pas du tout en ma faveur. Les chances pour que je l’emporte oscillaient entre zéro et un. En 2022, j’ai pris part à la course à la chefferie pour une seconde fois. J’ai fini par la gagner, mais au départ, les sondages estimaient que j’étais le candidat le moins populaire. Tout ça pour dire qu’il ne faut pas faire de la politique en fonction de calculs de risque. On est condamné à faire des choses qu’on va regretter. Il faut déterminer ce qui nous motive et ce qu’on pense qui doit être fait, indépendamment des sondages et des probabilités.
Quelle est la partie de votre travail que vous préférez?
La campagne électorale. C’est en campagne électorale que tu proposes à la population des choses. La population t’écoute et se demande : « Est-ce que je prendrais cette proposition ? » Alors qu’au quotidien de la politique, ce sont des tomates qui s’envoient dans toutes les directions. C’est plus difficile d’avoir de l’espace pour amener des nouvelles idées. On réussit des fois à le faire, mais beaucoup moins qu’en campagne où le ton est plus propice à l’écoute et l’échange.
Si vous étiez premier ministre, que changeriez-vous ?
Le Québec deviendrait un pays, ce qui n’est pas mineur. Ça veut dire qu’on arrêterait de donner de l’argent en impôt aux sables bitumineux de l’Alberta. On ferait des choix responsables sur le plan environnemental à même notre propre budget au lieu de se faire imposer un agenda anti-environnemental par Ottawa. Tout ce qui touche à la protection de la jeunesse et à la réduction des inégalités sociales, notamment sur le logement, changerait beaucoup.
Quelle importance accordez-vous à l’environnement ?
Comme je viens de dire, c’est l’une des questions les plus structurantes et les plus urgentes de notre époque. C’est difficile d’avancer sur cette question si tu n’as pas le pouvoir de décider et que la moitié de tes impôts s’en vont à un autre palier de gouvernement qu’on peut qualifier de « pétrogouvernement ». C’est-à-dire que le gouvernement du Canada est tellement infiltré par les lobbies du gaz et du pétrole que quand ils vont à la conférence sur le climat (COP) , les gens qu’ils invitent avec eux sont les gazières et les pétrolières. Je pense qu’on ne devrait absolument pas envoyer notre argent dans ça. On devrait investir dans des énergies renouvelables, vertes. Ça aurait dû être déjà fait il y a dix, quinze, vingt-cinq ans. On est en retard déjà. Ultimement, il faut que les gens votent en conséquence. Des fois, les gens ne veulent pas voir. Ils veulent une partie du résultat, mais ils ne veulent pas faire tous les changements pour être cohérents. C’est ça ma mission dans les prochaines années. Convaincre qu’en devenant un pays, on va cesser de faire des choix stupides sur le plan environnemental. On va se faire confiance et faire des choix responsables qui vont changer la donne tant au Québec qu’ailleurs. Je pense qu’on va devenir des diplomates environnementaux pour influencer tous les pays.
Pour vous, la persévérance scolaire, c’est quoi ?
La persévérance scolaire, c’est la clé d’une société qui va bien. Si les gens ne sont pas scolarisés et ne persévèrent pas, tu as plus de problèmes sociaux et plus de richesse à répartir. Pour un gouvernement, ça devient beaucoup plus difficile. C’est un peu la fondation d’une société, l’éducation. C’est sûr que la pandémie a donné un coup dur à toute une génération qui a été déconnectée et on pourrait même dire désocialisée d’une certaine manière. Il faut y remédier pour être certain que chaque jeune a les outils pour se faire une vie qui est à la hauteur de ses aspirations.
Quel message voulez-vous lancer aux jeunes de notre région ?
Si on ne rêve pas quand on est jeune, on ne rêvera jamais. Mais pour rêver correctement, c’est-à-dire se donner des objectifs qui ont le potentiel d’influencer positivement la société, on ne peut pas s’en remettre aux médias sociaux et à la propagande. La propagande, ce n’est pas de l’information, c’est de la publicité ou des messages mensongers pour influencer l’opinion des gens. Malheureusement, les technologies ont évolué de sorte qu’il y a des gens (de toutes les générations, soit dit en passant) qui se satisfont de ce qu’ils ramassent sur Instagram ou TikTok. Mais ce ne sont pas des sources d’information fiables. C’est donc la responsabilité de chacun de se tenir au courant de ce qui se passe avec une diversité de médias connus, qui offrent des garanties de crédibilité. C’est un devoir essentiel si on veut participer à la société après. La désinformation me semble être un des gros défis qu’on aura dans les prochaines années.
Que pensez-vous des jeunes qui s’impliquent bénévolement dans leur municipalité ?
Je ne peux pas être contre ça. (rires) Surtout quand on commence entre douze ans et dix-huit ans. Déjà, de vous impliquer pour une cause sociale ou politique, à l’échelle municipale ou provinciale, ça vous distingue de beaucoup d’autres jeunes. Ça vous prépare à des choses intéressantes. Plus on s’implique, plus on apprend. Il n’y a pas que l’école standard pour apprendre dans la vie et progresser. Moi, je suis évidemment en faveur de toutes les implications de cette nature.
Quelle importance doit-on accorder à l’activité physique?
Dans ma vie à moi, si je ne fais pas d’activité physique, je ne dors pas, je prends du poids et mon visage grossit. (rires) Pour faire quelque chose d’exigeant comme les études, on ne peut pas négliger l’équilibre entre son corps et son esprit. Les philosophes grecs disaient ça : « Un esprit sain dans un corps sain ». Ça a toujours existé. On ne peut pas négliger l’exercice et le sport, sans quoi le reste commence à être compliqué. C’est mieux de prendre l’habitude jeune. Moi, j’ai commencé à m’entraîner dès l’âge de dix ans, je jouais au tennis régulièrement. Depuis, je n’ai pas arrêté de faire du sport, sauf si j’étais blessé, et j’ai 46 ans aujourd’hui.
Que pensez-vous de la relation entre les jeunes et/ou la vapoteuse ?
Respecter les différences, c’est aussi respecter les choix des autres. Inutile d’être agressif avec ceux qui vapotent. Mais est-ce que c’est une bonne idée de vapoter ? La réponse est non. Je pense que chacun devrait se demander ce que ça lui donne de vapoter. Si ton gang t’exclut si tu ne fais pas comme eux, qu’est-ce que ça dit sur le lien que vous avez ? En plus, c’est lié à des maladies pulmonaires qu’on ne s’explique pas. Ce n’est pas comme la cigarette, mais il y a certaines maladies assez étranges qui apparaissent après un certain nombre d’années de vapotage. C’est comme n’importe quelle substance inutile et nocive. Quand tu commences, la question à te poser est : pourquoi tu le fais? Donc, ce serait fou de commencer.