Entrevue avec Luc Poirier, entrepreneur, réalisée par Shanny Croteau, Éliane Desmarais, Makayla Nantel et Charline Pelletier des Comités 12-18 de St-Rémi-de-Tingwick, Lefebvre et St-Félix-de-Kingsey.

Décrivez-nous votre entreprise.

Au fil des années, j’ai eu une cinquantaine d’entreprises dans toutes sortes de domaines. Principalement depuis six ou sept ans, c’est plus du développement de terrains que je fais. Je fais de l’immobilier, mais c’est large comme domaine. J’ai touché un peu à tout, j’ai eu des blocs d’appartements, des bâtiments commerciaux, des bâtiments industriels. J’ai construit de gros édifices à Montréal. J’ai été aussi courtier immobilier. Mais aujourd’hui, je fais que, ou à peu près que, du développement de terrains.

Quels types de métiers peut-on retrouver dans votre entreprise ?

Dans le développement de terrains, on fait à peu près tout à l’externe à part la comptabilité. Ce que ça prend, c’est l’urbaniste, l’arpenteur et le biologiste. Qu’est-ce qu’il y a d’autres aussi ? L’ingénieur pour mettre les rues, les trottoirs et les lampadaires. Les ingénieurs électriques et mécaniques d’Hydro-Québec. Tout se fait à l’externe avec des sous-traitants. Avant, quand je construisais des buildings, j’avais à peu près 180 employés parce qu’on avait de tout : des charpentiers, des menuisiers, des « gars journaliers » comme on les appelle, des chargés de projets, etc. Mais aujourd’hui, comme je fais plus du développement de terrains, c’est beaucoup plus simple. Ce sont les quelques de sous-traitants que j’ai nommés au début et c’est à peu près tout.

Quelles sont les valeurs de votre entreprise ?

C’est bizarre à dire, mais c’est de créer de la valeur. C’est ça le concept. Je prends un terrain que personne veut, sur lequel il y a une industrie qu’il faut que je démolisse ou des problématiques de contamination. Je monte un projet global et je crée de la valeur. Au niveau des valeurs de l’entreprise, c’est la franchise, le dévouement, la persévérance. En fait, je suis reconnu comme un créateur qui a peur de rien. J’achète des terrains contaminés que personne ne veut, dont le terrain juste ici . J’ai payé 23 millions il y a trois ans et ça vaut 400 millions aujourd’hui. Mais personne n’en voulait il y a trois ans, même à 23 millions. Quand j’ai acheté ça, les gens riaient de moi. Les gens me reconnaissent comme quelqu’un qui a peur de rien et qui aime les défis. Je pense que c’est ça, la valeur de l’entreprise. On fonce, on n’a pas peur et on se débrouille parce qu’il n’y a rien de facile, il y a toujours des difficultés. On vit avec et on va jusqu’au bout. On finit ce qu’on a commencé. C’est l’une des valeurs de l’entreprise.

Dans ma vie personnelle, par exemple, j’avais lâché l’université entre ma première et ma deuxième année à cause de mon magasin informatique qui a tellement bien fonctionné et demandé. Je me suis dit que j’allais m’occuper plus tard de mes études et « plus tard » n’est jamais arrivé, sauf dernièrement. Donc aujourd’hui, je finis mon université parce que je finis toujours ce que je fais. C’est une valeur personnelle, mais aussi celle de ma compagnie. Aller jusqu’au bout et tout faire pour y arriver.

Quelles qualités de base recherchez-vous chez vos employés quand vous les embauchez ?

Qu’ils soient différents des autres. Quand je travaillais au magasin informatique, tous les gens qui venaient avec des CV et qui venaient de finir l’université (avec un bac en informatique), ils étaient toujours dépassés par les petits jeunes de quinze ans qui étaient des petits « nerds » dans leur sous‑sol. Ils mangeaient de l’informatique du matin au soir. Moi, c’était les petits jeunes de quinze ans que j’engageais et qui aujourd’hui sont les meilleurs au monde. Ils travaillent pour Microsoft pour 1 million par année. Ils n’ont pas été à l’université ou fait beaucoup d’études, mais ils sont brillants et différents des autres.

J’essaie de trouver la perle rare qui va se démarquer, être différent, penser autrement. Là, j’ai de moins en moins d’employés parce que je veux une qualité de vie et gérer les employés, ce n’est pas toujours évident. J’ai décidé de m’occuper des terrains pour avoir moins d’employés que les 180 que j’avais avant. Surtout que dans le monde de la construction, c’est un monde où il y a beaucoup de boissons et de drogues. Ça se vole entre eux les outils, ça se bat, il y a beaucoup de testostérone. Il se passe toutes sortes d’affaires.

Donc ce que je recherche, c’est quelqu’un de différent et de franc. Parfois, l’employé, ça lui ne tente pas de rentrer. J’aime mieux qu’il le dise au lieu de raconter toutes sortes d’histoires. Être honnête, c’est la base. Après ça, j’aime engager des employés qui sont de belles personnes d’abord et avant tout parce que tout peut s’apprendre. Mais ça ne sert à rien d’engager quelqu’un qui connaît tout, mais qui n’est pas capable d’être avec d’autres gens. Il y en a qui sont antisociaux. Moi, je préfère quelqu’un qui est une belle personne, bien élevé, respectueux envers les autres et à qui tu peux montrer le job plutôt qu’une personne qui connaît tout, mais qui n’est pas fin ou menteur.

Y a-t-il des réalisations ou des projets de votre entreprise dont vous êtes particulièrement fier ?

Il y en a plusieurs. On me connaît beaucoup pour l’histoire de l’île Charron. C’est un terrain que j’ai acheté et sur lequel le gouvernement, pendant quatre ans et demi, a mis une réserve. Je ne pouvais rien faire avec. J’avais tout mis mon argent dans ce terrain-là et j’avais un prêteur privé avec un gros taux d’intérêt à 14 %. Donc chaque mois, ça me coûtait à peu près 50 000 $ d’intérêts. J’avais plus d’argent. Pendant quatre ans et demi, je me suis débrouillé pour créer 50 000 $ par mois de revenus avec 0 $. Le gouvernement a vu que j’étais comme une coquerelle impossible à tuer et ils m’ont donné 15 millions. Ça, c’était en 2012. J’avais payé 6 millions et ils m’ont donné 15. Moins l’impôt et tout ça, il me restait 8 millions avec les prêts. C’est avec ça que je suis réellement parti en affaires et que ça a bien été.

Selon vous, quels sont les avantages à travailler en région ?

Oh, il y en a plein, la qualité de vie d’abord et avant tout. Pas de trafic. L’air pur, plus de nature. Les gens sont plus calmes. J’ai des chalets à Bromont et au Lac-Brome et les gens sont relax. Ce n’est pas la même clientèle à Montréal ou en ville. Il y a un paquet d’avantages. Pendant la COVID, tout le monde est parti en région avec le télétravail. On pense même, nous, déménager peut-être un jour pas si lointain à Bromont, justement parce que la qualité de vie est incroyable comparée à celle de Montréal. Oui, il y a plein d’avantages. L’un d’eux, c’est que quand tu es employeur, pour trouver de la main-d’œuvre, tu grossis, tu grossis, c’est difficile, il y en a moins. Tu as des avantages et des désavantages aussi, tu as les deux. C’est certain que ce n’est pas pour rien que moi, je ne suis pas à Montréal. Je ne veux rien savoir du centre-ville. Avant, le trafic, c’était démentiel et là, ça va recommencer quand le monde va revenir au bureau. Plus tu es loin… en tout cas (rires).

Comment se passe une journée de travail pour vous?

Une journée typique, je rentre le matin vers 7 h 45 et 8 h. Je fais de la paperasse, c’est beaucoup de travail de bureau, je ne travaille pas de mes mains réellement. Des fois, j’ai des dîners d’affaires. L’après-midi, c’est encore de la paperasse et je suis tout le temps à la maison pour le souper. Je soupe avec ma famille, mes enfants. C’est l’une des raisons pour lesquelles j’ai décidé de ne plus construire. La construction commençait à 6 h le matin et je ne pouvais pas déjeuner avec les cocos. Le soir, ça finissait vers 6 ou 7 h et le temps d’arriver chez moi… Mes journées, ce n’est pas le « jet-set ». Je rentre, je fais du travail de bureau, je retourne des appels, je réponds à plein de courriels, je fais des rapports, je travaille avec la comptable qui est là.

Mais je travaille de moins en moins, je prends quatre mois de vacances par année et des fois, je prends des après-midis de congé. Ce n’était pas le cas voilà cinq ou dix ans. Mais de plus en plus, je peux me le permettre avec le développement de terrains. Tandis qu’avec une compagnie de construction, je ne pouvais pas. Avant, j’avais des compagnies d’étau-ébéniste, au détail et d’informatique. Tu as des employés, mais si tu n’es pas là, ça ne marche pas autant. Tout le monde veut voir le boss. Toutes les problématiques, c’est toi qui les règles. Même si tu as des bons gérants, c’est toi qui dois être là. J’ai laissé tomber l’étau-ébéniste, j’en veux plus. Le terrain, si je ne rentre pas demain matin, ce n’est pas la fin du monde à moins que j’aie des rendez-vous planifiés. Au pire, je les annule et les déplace. C’est pas du tout pareil.

Il ne faut pas être esclave de notre travail dans le meilleur des mondes. Les jeunes de votre génération, c’est un peu ça. Ils ne veulent pas de poste. Ils arrivent dans une entrevue d’emploi et ils veulent deux mois de vacances en partant. Ça change les choses, votre génération.

Quelle est la partie de votre travail que vous préférez?

Tous les jours sont différents et posent de nouveaux défis. Quand j’achète des terrains, celui que j’ai acheté n’est pas le même que celui que j’ai acheté avant et l’autre d’avant. C’est plaisant parce que ce n’est jamais pareil. Je ne serais pas capable de travailler dans une usine d’automobiles et de mettre une pièce là, puis une pièce là et de faire ça 8 heures par jour. Ce que j’aime de mon travail, c’est que ce n’est jamais pareil et qu’il y a toujours de nouveaux défis. C’est toujours compliqué. Quand tu développes des terrains, tu te bats avec la ville, le ministère de l’environnement, les citoyens qui sont alentour du projet. Toujours, sans arrêt et j’aime ça, me battre. (rires)

Jusqu’où rêvez-vous d’amener votre entreprise ?

En ce moment, je suis en mode stabilisation. Je n’ai pas 50 projets, j’ai 10 projets et ils sont tous là derrière. Je n’en veux pas 50. Je veux acheter un ou deux terrains par année, c’est tout. Les projets, retenez ça c’est bien important : C’est qu’il y en a beaucoup qui se pètent les bretelles en disant par exemple : « J’ai 300 portes de logement ». Mais si tu as 300 portes de logement à Shawinigan, ce n’est pas la même chose qu’avoir 300 portes de logement à Westmount (Montréal). L’important, quand on est en affaires, c’est la ligne du bas, la ligne des profits. Les épiceries, par exemple, ils ont beaucoup de chiffres d’affaires. Ils vendent beaucoup, mais il leur reste 3 % de marge de profits. Mais moi, les terrains, quand je les achète à 300 millions et que je les revends à 400 millions quelques années plus tard, la marge de profits est énorme. Je n’ai pas besoin de faire 150 terrains si j’en ai un qui me rapporte beaucoup plus que les autres. J’ai décidé avec le temps et l’expérience de choisir seulement les gros terrains avec beaucoup de possibilités de profits. Je fais moins de projets, mais ceux que je fais sont plus intéressants et profitables pour moi.

Pour quelles raisons devrait-on travailler pour votre entreprise ?

Il n’y a pas beaucoup de postes disponibles. On est trois. (rires) En fait, on est quatre. Il y a la comptable qui est là et j’ai deux employés qui s’occupent de mes bébelles (bateaux, motoneiges, motos, autos). J’ai une employée réellement, je n’engage plus. Il y a plein de monde qui aimerait ça venir et travailler de six mois à un an, gratuitement, parce qu’ils veulent apprendre. Ce que je fais, ça ne prend pas beaucoup de connaissances. Ça se vit. Il y a un paquet de non-dits et de non-écrits qui s’acquièrent pour savoir si un terrain est bon ou pas bon. Les gens veulent avoir cette connaissance. Mais… non, je n’engage plus, j’en veux plus. (rires)

Qu’est-ce qui vous inspire dans la vie ?

Ma famille bien évidemment. C’est ma priorité. Les défis et la liberté également. Dans mon livre « Voir grand : leçons d’affaires, de vie et de liberté », quand je voulais ajouter le sous-titre « leçons de vie et liberté » et que je voulais absolument écrire « liberté », l’éditeur et mon coauteur trouvaient que le titre était trop long. Je leur ai dit que pour moi, c’est le mot le plus important. J’ai travaillé fort tout mon début de vie adulte, mais le but, c’était d’être libre. Je ne pensais jamais être capable d’acheter des Ferrari et tout ça. Je voulais juste avoir assez d’argent pour être libre. Mettons que je suis au restaurant et que j’hésite entre deux plats, je peux prendre les deux et piger entre les deux. J’ai acheté des valises en fin de semaine parce que les miennes étaient rendues vieilles. Mais le sac à dos vient avec, puis un autre truc vient avec, puis un autre parce que c’est un kit. Ce qui fait que je finis par avoir tout le kit au complet. Ça te permet d’avoir une liberté. On mange bien, on essaie de bien manger biologique et tout ça, mais ça coûte cher. On va en Floride au « Whole Foods », ce n’est pas le même prix que de manger de la cochonnerie. Ça te permet d’être libre et de choisir, c’est ça qui est important. Moi, je suis attaché à aucun bien matériel. Si je vendais toutes mes autos, ça ne me dérangerait pas. Mais perdre ma liberté, ça, ça me dérangerait.

La liberté, c’est de pouvoir aller à n’importe quel magasin quand tu as besoin de quelque chose et de ne pas avoir à attendre le rabais ou les petits coupons ou peu importe. Ça a une valeur. Ma mère, quand on allait à l’épicerie, elle apportait ses coupons et on faisait trois épiceries. Le lait était moins cher à une place et les céréales, à une autre. On se promenait pour sauver des sous, on perdait du temps. Elle était sur l’aide sociale ma mère. Elle avait du temps en masse. (rires)

La liberté, c’est aussi quand mes enfants étaient malades, on allait aux États-Unis les faire soigner. Ce n’est pas si cher que ça. Tu traverses la frontière, qui est à 45 minutes d’ici, tu t’en vas à Plattsburgh et ça coûte 150 $. Ce n’est pas 50 000 $. Tu as un médecin tout de suite, tandis qu’ici à l’urgence, c’est quoi ? Quinze heures, vingt heures d’attente ? Des fois, on allait les faire soigner en Floride. Ma fille était tout le temps malade, tout le temps des otites. Mettons qu’elle était malade le matin, on prenait l’avion (il y a des avions qui partent chaque heure durant l’hiver) et on allait en Floride. Là-bas, juste avec l’air salin et l’humidité, l’otite partait le lendemain. Puis on revenait et tout était correct. Ce sont ces petits plaisirs de la vie qui font toute une différence.

Pour vous, la persévérance scolaire, c’est quoi ?

Tu vois, moi je n’avais pas fini l’université et j’y suis retourné parce que je voulais absolument finir. Je dis à mes enfants que c’est super important l’école et de se rendre le plus loin possible, au moins d’avoir un bac idéalement. Peut-être pas une maîtrise, ce n’est pas une nécessité. J’en ai une et je n’ai pas besoin d’avoir ça. Je veux faire un doctorat en business (EMBA[1]) et j’attends qu’ils sortent leur demande d’admission chaque année pour le faire. Je n’en ai pas besoin, ça ne change rien dans ma vie, j’aurai pas un meilleur poste ou plus d’argent. Mais j’aime apprendre. Puis c’est intéressant, je vais avoir un titre et un diplôme. Pour moi, c’est super important, l’école.

C’est drôle parce que je viens d’une famille pour qui l’école, ce n’était vraiment pas important. Moi, si je ne me levais pas le matin, ma mère ne disait rien. J’étais très bon à l’école, mais on n’était pas obligés d’y aller. En plus, vu que j’étais doué, je m’ennuyais. J’ai un TDA accoté solide, ça n’allait pas assez vite pour moi et j’étais tanné. Pour passer le temps, je faisais des niaiseries et j’en ai tellement fait que je me suis fait mettre dehors de deux écoles. Il n’y en avait plus aucune qui voulait m’accepter. Heureusement, il y a une loi au Québec qui m’a sauvé la vie. C’est la loi qui dit que si tu as 16 ans et moins, tu n’es pas obligé d’aller à l’école. Donc ils ont été obligés de me prendre, mais sans cette loi, j’aurais été un gars à part de l’école. Donc pour moi, c’est super important.

Mon fils de 19 ans a commencé à faire de l’immobilier à 16 ans. Il pourrait faire ça, il vaut facilement un demi-million après deux ans et demi. Il est bien parti s’il continue comme ça, pas besoin d’aller à l’école. Mais je veux absolument qu’il aille à l’école, qu’il finisse son cégep et qu’il ait un bac. Encore là, c’est lui qui va décider, mais je n’arrête pas de lui dire que c’est important. Je pense que c’est un plus dans ta vie. En fait, ce qu’on veut donner à nos enfants, ce sont des outils. On leur donne le maximum d’outils. Mes deux enfants sont bilingues, complètement. Moi, je ne le suis pas parce qu’à l’époque, il y avait pas de Netflix et d’ordinateurs. Aujourd’hui, tout se passe en anglais sur le Web. Avec des séries sur Netflix, les jeunes apprennent plus l’anglais que nous. Ça m’a bloqué toute ma vie de ne pas être bilingue. C’est super important pour moi qu’ils le soient. Là, ils apprennent l’espagnol et ma fille apprend le mandarin. Ma fille est malentendante. Elle n’est pas supposée être capable de parler français comme il faut. Ils lui ont dit qu’elle ne serait jamais capable d’apprendre une autre langue. Et là, elle est presque trilingue. Ils sont partis dans un camp de vacances en Ontario. À la fin de leur secondaire 5, ils vont être trilingues.

C’est tous ces petits outils qui font que tant mieux si tu te rends le plus loin possible. Ce n’est pas compliqué : plus tu as de scolarité, meilleure est ta vie en général. Tu as des meilleurs salaires, des meilleures conditions de travail et des promotions plus rapides. Le gouvernement n’encourage pas les jeunes à apprendre l’anglais. J’ai essayé d’envoyer mes enfants à l’école anglaise et ils ne voulaient pas. Mais en même temps, ils savent très bien que les gens bilingues gagnent beaucoup plus cher que les gens unilingues francophones. On se prive d’une qualité de gens qui serait supérieure et des salaires supérieurs, donc des impôts supérieurs. C’est nono de tout faire pour que les jeunes n’apprennent pas l’anglais. La loi est faite comme ça pour que les gens n’apprennent pas l’anglais. C’est plate parce que plus tu as d’outils, mieux que c’est. L’école, c’est important.

Quel message voulez-vous lancer aux jeunes de notre région ?

Que tout est possible. Dans la région, il y a plein d’entrepreneurs qui réussissent et dont on entend parler. La génération avant la mienne, ils naissaient et vivaient au Québec jusqu’à leur mort. Maintenant, c’est mondial. Le village est mondial. On est plus restreints à Drummondville ou peu importe. D’ailleurs, ma femme a peur que nos plus jeunes aillent étudier à Boston ou ailleurs. Peur qu’ils se fassent des blondes et des chums et qu’on ne les revoie plus parce qu’ils vont déménager. C’est ça la réalité d’aujourd’hui. On n’est pas restreints. Les possibilités sont tellement faciles, le monde appartient à tout le monde. Il n’y a plus de limites d’espace. Autrefois, mettons que tu naissais dans une famille de mécaniciens, tu devenais mécanicien si tu étais un homme. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. La citation d’Iron Man, c’est : « Anything is possible ». Je dirais la même chose.

Que pensez-vous des jeunes qui s’impliquent bénévolement dans leur municipalité ?

Je pense que ça fait grandir. Ma mère était sur l’aide sociale, mais elle nous amenait faire du bénévolat avec elle. Elle en faisait énormément. Ça fait grandir la personne, pas juste ceux qui reçoivent les services. Je pense que c’est important et que ça fait partie d’une bonne éducation. Ça donne des outils pour plus tard. Pour te donner un exemple concret, quand je me suis fait mettre dehors des deux écoles et qu’il n’y en avait aucune qui voulait me prendre, ma mère a demandé une rencontre avec la ministre de l’Éducation, Mme Pauline Marois, qu’elle connaissait. C’est donc grâce à ma mère qui faisait du bénévolat dans des communautés que Pauline Marois s’est arrangée pour que je revienne à l’école. Le bénévolat apporte plein de choses que tu ne vois pas sur le coup, mais sur le long terme, c’est super bon. Ça en prend des bénévoles.

Quelle importance doit-on accorder à l’activité physique?

C’est très important. Depuis un an, je m’entraîne et le pourquoi, c’est que je vois trop de gens qui tombent à la retraite à 65 ans et qui sont tout croches. Ils sont malades, ils ont de la misère à marcher, ils se promènent en triporteur. Ça a aucun sens. C’est ennuyant  à dire, mais à cause de notre nutrition, 65 % des américains sont « overweight ». Ça donne du diabète, ça donne d’autres complications. On dit toujours « un esprit sain dans un corps sain », mais c’est important. Vieillir quand tu es mal en point, que tu es malade et que tu as mal partout, ce n’est pas plaisant. C’est super important de bouger. Ça peut être juste de marcher. J’ai ma belle-mère qui fout rien, elle a de la misère à bouger dans une maison. On lui dit : « Pourquoi tu ne vas pas marcher ? » Je connais des personnes âgées qui ont 70 ans qui font juste marcher. Ils ne font rien de spécial, mais ils font des marches tous les jours, des fois avec leurs chiens. Ça fait toute la différence. Ça fait partie d’un équilibre de vie. Il y en a qui font juste travailler. Ils n’ont pas de vie de famille parce qu’ils perdent leur femme et tout ça. Ce n’est pas bon, ça prend un équilibre dans tout. Le travail, c’est un équilibre. La famille, les amis, le foyer, ça te prend un cadre de vie qui te ramène aux valeurs. Bouger, c’est important, c’est un tout.

Que pensez-vous de la relation entre les jeunes et la cigarette et/ou la vapoteuse ?

Heureusement qu’il y a de moins en moins de jeunes qui fument, mais il y en a de plus en plus qui vapotent. Mon plus vieux vapotait, je ne sais pas s’il vapote encore. C’est problématique. Au moins, ils ont enlevé les saveurs ou ils vont le faire. C’est bien parce que pour les jeunes, c’est attirant, ça a un bon goût. Déjà, s’ils enlèvent les saveurs, ça va aider, mais c’est la pire affaire. Mon frère a fumé toute sa vie, il a voulu bien faire. Il jouait au hockey avec moi et même s’il avait moins de souffle que moi, il était capable. Il a commencé à vapoter et il a développé une maladie pulmonaire obstructive chronique. Maintenant, il ne peut plus jouer au hockey. Il ne peut plus rien faire. Il n’y a pas assez de trucs scientifiques encore, c’est récent. Il y en a qui disent que ça va être pire que la cigarette. Je ne sais pas si c’est vrai, mais dans les deux cas, ce n’est pas bon. C’est nocif. Ma mère est morte du cancer du poumon parce qu’elle fumait.

Souvent, la cigarette est associée aux gens plus pauvres, c’est comme la boisson. On était pauvres, alors tout le monde fumait dans ma famille. Moi, je n’ai jamais fumé, je n’ai jamais essayé. Je faisais de l’asthme quand j’étais plus jeune parce que mes parents fumaient. Aussitôt que je suis parti tout seul dans ma maison, l’asthme est parti. Mes poumons se sont régénérés. Avant, ils fumaient dans l’auto et ils n’ouvraient même pas les vitres. Il y avait tout le temps de la boucane. On habitait dans des petits appartements, des 5 ½  à 800 pieds carrés, c’était petit. Quand ça fumait, tout l’appartement sentait la cigarette. On n’avait ni air climatisé ni changeur d’air. On fumait la fumée secondaire. Moi je suis contre la cigarette, totalement. La société ne l’encourage pas, mais c’est tout comme. Ils pourraient dire que c’est illégal et dans une couple d’années, ce serait terminé. Mais ils ne le font pas. Ils font des taxes. Avec un paquet de cigarettes à 14 $, ils se font 10 $ de taxes et ils le remettent dans le système de santé après. C’est un vase communicant. Ils vont chercher de l’argent, mais c’est pour soigner des gens comme ma mère qui avait le cancer.